mardi 17 janvier 2017

Haute mer

Ce sont des rêves de haute mer
Qui mettent vos vies à l’épreuve
Fuyant l’immonde de la guerre
Un pays, une terre veuve

Agrippant la corde d’espoir
A vos émigrantes pensées
Vous tendez la main dans le noir
D'une eau vorace à vos apnées

Vos voix crissent sur la bouée
Accrochent des mots dans le vide
Se noient à la sueur glacée
D'un bateau gonflé de liquides 

Vous flottez comme poissons morts
Sur la face glacée de l’eau
Puis la mer engloutit vos corps
Avale vos rêves d’oiseaux

Je voudrais vous conduire à terre
Et sauver du sombre marasme
Ces hivers embarqués en mer
Épargner votre vie du drame

J’entends les cris d’une autre terre
Cadavre d’enfant sur la plage
Les survivants cherchent leur frère
La mort à présent n’a plus d’âge

Visage de sel crevassé
La bouche tordue à l’angoisse
De toute vie les yeux vidés
Comme le poisson de sa poisse

Quels ont été ses derniers mots
En quelle langue a-t-il prié
A quelle minute, quelle gorgée
Noyait-il mon humanité ?

Des hommes viennent ramasser
Sur la jetée le petit corps
Dans un camp de réfugiés
Qui veillera son âme encore ?

J’ai dans les yeux une méduse
Qui pétrifie tous les je t’aime
A vos souffrances mon cœur s’use
Je n’aurai écrit qu’un poème




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